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RENCONTRE AVEC UN PASSEUR DE MEMOIRE : PAUL SOBOL

Alors que les élèves du collège Jeanne d’Arc étudiaient depuis quelques temps la période de la seconde guerre mondiale, ils ont eu l’honneur et la chance de pouvoir assister à un témoignage poignant. Monsieur Paul Sobol, un ancien déporté juif, est venu ce Mardi 10 janvier 2017 au collège, pour relater son expérience à Auschwitz. Nous sommes allés à sa rencontre afin d’en savoir un peu plus sur cet homme qui témoigne auprès des jeunes désormais depuis plus de trente années.

Pourquoi demandez-vous aux jeunes, au début de votre témoignage, de fermer les yeux pendant une dizaine de minutes ?

Depuis 1987, je fais des témoignages devant des centaines et des milliers de jeunes, et j’ai compris que ça ne servait à rien de vous bourrer le crâne de choses, que de toute façon vous allez oublier. Donc moi, je tiens à ce que vous vous souveniez de moi, et de cette période. Alors voyez-vous j’ai mis au point une méthode de communication pour les jeunes, et ça fonctionne, parce que les jeunes m’écrivent. J’ai des centaines de lettres de jeunes qui me disent « C’était formidable, on vous a suivi dans votre parcours ». Si vous fermez vos yeux, ce vieux bonhomme qui est devant vous disparait. Vous ne me voyez plus, mais vous avez des oreilles, vous avez une imagination, vous allez pouvoir vous imaginez que c’est un jeune de votre âge qui vous parle.

Comment avez-vous pu tenir le coup durant les années que vous avez passées à Auschwitz ? Est-ce grâce à votre petite amie, Nelly, restée en France ?

Oui, Nelly a questionné des gens, elle a appris qu’une famille juive, ma famille, avait été arrêtée et emmenée à la gestapo. Pour mon anniversaire elle est venue, elle a pu remettre un colis, et je l’ai reçu. Il y avait quelques fruits, un cake, mais il y avait aussi un miracle : au fond de la boîte il y avait une petite photo d’elle. Et pour moi, c’était extraordinaire de savoir qu’à l’extérieur de cette prison : quelqu’un pensait à moi. Une fois arrivé au camp d’Auschwitz, ils nous ont demandé de nous déshabiller mais j’avais la photo de Nelly dans la poche, je n’allais pas leur laisser ça. J’ai pris la photo, je l’ai pliée en huit et je l’ai gardée dans mon poing droit. Je l’ai gardée tout le temps où j’étais au camp. Et quand je regardais cette petite photo de Nelly je reprenais espoir.

Quel est le souvenir le plus fort que vous gardez d’Auschwitz ?

Dans le camp, j’ai travaillé dans un kommando de service pour les SS, en tant que menuisier. Mais comme je n’étais pas menuisier, je n’étais donc pas capable de fabriquer des petites boîtes en bois. J’ai alors pris une de ces petites boîtes, et j’aicommencé à la décorer avec de la peinture. Mais l’autre menuisier a cru que j’abîmais son boulot, il est parti voir le kapo, pour le lui dire. Je l’ai donc vu arriver, son bâton déjà levé pour me frapper. Il m’a arraché des mains la petite boîte que

Paul Sobol

j’étais en train de décorer, et je l’ai vu la regarder très intrigué. Après avoir réfléchi, le kapo m’a rendu la boîte et m’a tapé sur l’épaule, tout en me disant « Continue » en allemand. Ce jour-là j’ai compris que j’avais sauvé ma peau, parce qu’en décorant ces boîtes j’allais lui faire gagner plus. A midi, quand il servait la soupe, comme pour me remercier, il allait au fond du bidon et me donner un bout de viande ou de pain, j’étais mieux nourri. C’est comme ça que mon papa et moi, nous avons pu mieux survivre.

Vous aviez un frère et une sœur, qu’est-il advenu de votre famille ?

Vous aviez un frère et une sœur, qu’est-il advenu de votre famille ? Une fois arrivé devant le camp d’Auschwitz j’ai vu quelque chose qui se passait à l’avant du troupeau : il y avait des SS qui étaient là et qui séparaient les femmes des hommes, très rapidement. Pour moi ça a été dramatique, brutale- ment ma maman a été mise à gauche avec ma sœur. Moi j’ai été mis à droite, avec mon frère et mon père. Je n’ai plus jamais revu ma maman. Quand la séparation des femmes et des hommes a été faite, ils ont poussé le groupe des hommes en avant, et il y a eu une nouvelle sélection : ils ont mis à gauche les malades, les vieux, les jeunes. Mon frère a été mis à gauche, mon père et moi avons été mis à droite. Par la suite j’ai perdu mon père de vue, en changeant de camp. Une fois la guerre finie, ma sœur est revenue, toute seule. J’attendais le retour de nos parents, mais ils ne revenaient pas. Alors je dû me prendre en charge tout seul, à 19 ans, alors que je n’avais absolument aucune expérience dans la vie.

Par Anna L., Clarisse D., Djenna H. et Claire D.

Nous tenons à souligner que cette interview est fictive, bien qu’elle contienne les propos réels de M. Sobol.

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© Collège Jeanne d'Arc

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